Déjà Nu
Court Métrage, 15min, experimental
CONTEXT & INTERPRETATION
INTRO
Le film étant lui-même une expérience, peut être ressenti et interprété de façons différentes. Il peut être vu comme une boîte que vous pouvez remplir avec vos propres pensées et émotions.
Pour cela, nous allons vous proposer un texte qui va vous donner des inspirations, des perceptions personnelles et quelques aperçus du processus du film. Nous, c'est-à-dire le réalisateur, Rolf Hellat, les actrices et acteurs Sylvia Ouattara, Laetitia Ky, Younouss Sadio, Jean-Luc Yonhite, Alpha Oumar Diallo et Doudou Touré.
Le film étant lui-même une expérience, peut être ressenti et interprété de façons différentes. Il peut être vu comme une boîte que vous pouvez remplir avec vos propres pensées et émotions.
Pour cela, nous allons vous proposer un texte qui va vous donner des inspirations, des perceptions personnelles et quelques aperçus du processus du film. Nous, c'est-à-dire le réalisateur, Rolf Hellat, les actrices et acteurs Sylvia Ouattara, Laetitia Ky, Younouss Sadio, Jean-Luc Yonhite, Alpha Oumar Diallo et Doudou Touré.
„Déjà Nu“ est un mélange de fiction, de documentaire, de clip musical et de film expérimental.
Le contenu a été créé par nous, des personnes du Sénégal, de la Guinée, de la Côte d'Ivoire et de la Suisse.
Au cours de ce processus de création, tous les contributeurs au film ont appris les uns des autres sur leurs origines, leurs biographies et leurs cultures. L'accent a été mis sur la liaison des cultures par le respect mutuel, l'intérêt interactif et une véritable appréciation de chaque personne et de chaque parcours de vie.
Nous parlerons de chaque scène du film: La scène de la créature de paille, la scène de la danse dans la poussière, la scène du sans-abri, la scène du sang menstruel, la scène de la chèvre sacrifiée, la scène de l'euphorie dans la nuit et la scène des pétales qui dansent.
Rolf Hellat: Pour moi, en général le film représente différents moments où les protagonistes* valorisent le corps. Dans des moments face à la mort, face à l'épuisement, face au tabou social, face à la perte, face à l'euphorie, face à la nature ou face au monde des rêves. Chaque scène reprend l'un de ces aspects.
Un thème important du film est aussi pour moi le caractère éphémère du corps, la qualité d'être transitoire, ou plutôt l'appréciation du caractère éphémère. L'idée de sa propre mort a pour moi à la fois quelque chose de fortement affirmatif sur la vie. Le titre "Déjà Nu" fait allusion à cet état d'esprit. „Déjà nu" symbolise le fait que je vais mourir et que je quitterai cette terre en tant que corps pur et rien d'autre. Il y a aussi quelque chose de motivant pour moi dans le fait de prendre conscience que la mort va arriver, que je suis déjà nu. Le film montre différents aspects de l'appréciation de son propre corps.
1
SCÈNE „KUMPO“ MASQUE DE PAILLE
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Rolf: Younouss, tu vis dans ce village et tu nous as fait partager cette créature de paille à travers cette scène de film. Est-ce que tu veux bien faire une petite introduction de l’être de paille?
Younouss: L'être de paille s'appelle Kumpo. Le Kumpo est un entité traditionnel de la mythologie du peuple Diola en Casamance au Sénégal. Le Kumpo est sacré. Il s'approche des gens pour les aider, pour encourager la communauté dans laquelle il apparaît, pour bénir par exemple la récolte du riz ou un mariage, ou pour servir de médiateur en cas de dispute. Le Kumpo est aussi un refuge. Ce n'est pas un homme, mais un esprit, un être, une créature. Il existe depuis longtemps. Depuis nos grands-parents, nos arrière-grands-parents, depuis de très nombreuses générations.
Rolf: La façon dont cette créature tournait avait pour moi quelque chose de profondément spirituel. Cette créature me place personnellement dans un état enchanteur d'humilité face à la nature, d'admiration et de calme.
Younouss: Oui, c’est ça. Tant qu’il arrive, les gens sont dans la joie, les gens vivent, leurs cœurs battent d'amour et de respect mutuel.
Rolf: Le mouvement circulaire constant a aussi quelque chose d'hypnotique. Le Kumpo symbolise pour moi le surhumain, qui repose sur une certaine imagination, et en même temps aussi l'hyper-réel, qui ne peut être expérimenté qu'avec les sens, ici et maintenant.

Rolf: Younouss, tu vis dans ce village et tu nous as fait partager cette créature de paille à travers cette scène de film. Est-ce que tu veux bien faire une petite introduction de l’être de paille?
Younouss: L'être de paille s'appelle Kumpo. Le Kumpo est un entité traditionnel de la mythologie du peuple Diola en Casamance au Sénégal. Le Kumpo est sacré. Il s'approche des gens pour les aider, pour encourager la communauté dans laquelle il apparaît, pour bénir par exemple la récolte du riz ou un mariage, ou pour servir de médiateur en cas de dispute. Le Kumpo est aussi un refuge. Ce n'est pas un homme, mais un esprit, un être, une créature. Il existe depuis longtemps. Depuis nos grands-parents, nos arrière-grands-parents, depuis de très nombreuses générations.
Rolf: La façon dont cette créature tournait avait pour moi quelque chose de profondément spirituel. Cette créature me place personnellement dans un état enchanteur d'humilité face à la nature, d'admiration et de calme.
Younouss: Oui, c’est ça. Tant qu’il arrive, les gens sont dans la joie, les gens vivent, leurs cœurs battent d'amour et de respect mutuel.
Rolf: Le mouvement circulaire constant a aussi quelque chose d'hypnotique. Le Kumpo symbolise pour moi le surhumain, qui repose sur une certaine imagination, et en même temps aussi l'hyper-réel, qui ne peut être expérimenté qu'avec les sens, ici et maintenant.
Younouss: Quand j'ai vu le Kumpo pour la première fois, j’étais aussi stupéfait. J’étais hors de moi. J’effondrais dans la masse. Et j’avais beaucoup de questions. Comment ça parvient a faire ca? Qu’est-ce qu’il y a caché derrière tout ca? Et je n’avais pas de réponses.
Rolf: C’est ća, j’avais pas de réponse. Il me semblait que le Kumpo me disait que nous humains n’ont pas une réponse à tout. Et c'est là que naît la modestie.
Younouss: L'Afrique a ces réalités. L'Afrique a vraiment ces réalités. Toutes les choses ne sont pas scientifiques, il y a des choses qui ne peuvent pas être expliquées.
Rolf: Le Kumpo est-il aussi un symbole d'une croyance Diola selon laquelle tout a une âme, y compris les animaux, les plantes, les rivières ou les étoiles, est-ce vrai?
Younouss: Oui, on peut dire ça. Nous ne sommes pas tombés de nulle part. Tout a une âme bien sur. Comment on peux expliquer vraiment la venue de l’etre humain? Qu’est-ce qui fait vivre cette humain, apart les organs visibles, et tout? Qu'est-ce qui élève réellement la pensée? Il y a tellement des questions, qui sont la. Qu'est-ce qui fait réfléchir l’homme? Il y a des choses qu’on arrive pas a voir. Que l'âme existe ou non, je ne le sais pas vraiment. Donc, je suis obligé de me plier par rapport a ca, pensant que ca existe. Parce-que cette pensée peux me bénéficier. Cela me permet d'accomplir des actions bonnes, attentives et utiles envers mes semblables. C'est la pensée sociale, qui est là.
2
Rolf: L'idée que tout ce qui m'entoure est animé est en fait une contribution très pertinente à plus d'empathie, de compassion et de souci pour mon environnement et mes semblables.
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Younouss: C’est ca. Quand le Kumpo réunit les gens, c’est toujours dans le bon sens.
Rolf: Dernièrement, je suis tombé sur l'expression allemande "mein Smartphone hat seinen Geist aufgeben" (Mon smartphone a rendu l’âme), c'est drôle.
Younouss: La pensée que tout a une âme est aussi ancré dans la langue.
Rolf: En tant qu'enfants, nous étions trés réceptifs à l'imagination des entités qui nous entouraient. C'est pourquoi c'est un enfant qui parle dans cette scène. Un enfant de la sagesse. Lorsque l'enfant chuchote dans le film "regarde le ciel, il te voit", la perspective se déplace soudain pour moi. Ce n'est plus moi qui vois le ciel, mais le ciel qui me voit aussi. Tout ce que je regarde regarde en arrière. Mon regard influence le regard en arrière. Le ciel lui-même devient une entité qui regarde en arrière. Le ciel devient une entité dans laquelle je me projette avec empathie. La voix de l'enfant nous invite à voir tout ce qui nous entoure comme une existence animée. Et c'est là aussi que réside la beauté de la foi diola.
Younouss: Il y a aussi un aspect dangereux dans la pensée que tout a une âme. Parce que ça peut faire peur. Cela peut provoquer de l'anxiété chez certaines personnes. Heureusement, le Kumpo apporte un esprit positif.

Younouss: C’est ca. Quand le Kumpo réunit les gens, c’est toujours dans le bon sens.
Rolf: Dernièrement, je suis tombé sur l'expression allemande "mein Smartphone hat seinen Geist aufgeben" (Mon smartphone a rendu l’âme), c'est drôle.
Younouss: La pensée que tout a une âme est aussi ancré dans la langue.
Rolf: En tant qu'enfants, nous étions trés réceptifs à l'imagination des entités qui nous entouraient. C'est pourquoi c'est un enfant qui parle dans cette scène. Un enfant de la sagesse. Lorsque l'enfant chuchote dans le film "regarde le ciel, il te voit", la perspective se déplace soudain pour moi. Ce n'est plus moi qui vois le ciel, mais le ciel qui me voit aussi. Tout ce que je regarde regarde en arrière. Mon regard influence le regard en arrière. Le ciel lui-même devient une entité qui regarde en arrière. Le ciel devient une entité dans laquelle je me projette avec empathie. La voix de l'enfant nous invite à voir tout ce qui nous entoure comme une existence animée. Et c'est là aussi que réside la beauté de la foi diola.
Younouss: Il y a aussi un aspect dangereux dans la pensée que tout a une âme. Parce que ça peut faire peur. Cela peut provoquer de l'anxiété chez certaines personnes. Heureusement, le Kumpo apporte un esprit positif.
Rolf: Je me suis rendu compte que j'en savais trop peu sur les diverses croyances qui ne se définissent pas par rapport aux religions très répandues comme le christianisme, l'islam, le bouddhisme ou le judaïsme. Il y a encore beaucoup à apprendre pour moi. Le christianisme ou l'islam ont trop souvent rejeté les autres croyances comme étant fausses et ont tenté de les évincer et de faire du prosélytisme, jusqu'à aujourd'hui.
Younouss: Il faut dire, que le Kumpo ne fait pas de distinction de religion. Ce qui l'intéresse, c'est le choix des gens. La reunification des gens. C'est l'interreligion qui prime. Chacun croit a ce qu’il doit croire. Le Kumpo n'est pas là pour distinguer. C'est le lien qu'il veut, quelle que soit la religion.
Rolf: Je suis toujours impressionné. J'espère que cette scène invitera les spectateurs/trices à s'intéresser davantage aux différentes cultures et à en tirer des enseignements positifs. Sais-tu s'il y a eu des événements où les colonialistes français ont influencé la tradition du Kumpo, voire ont interdit le Kumpo?
Younouss: Non, je pense pas. Du temps de colonialisme je pense, que le Kumpo n’etait pas adiré.
Rolf: Pour moi, le Kumpo est la tradition sociale la plus impressionnante et la plus enrichissante que j'ai jamais vue. Merci, Younouss, de m'avoir fait vivre cette expérience et de nous avoir permis de réaliser cette scène de film ensemble.
Younouss: Merci à toi, Rolf. C'est un honneur de savoir que la Culture Sénégalaise, Casamançaise et en particulier la Culture Diola de mon village Tendimane est présentée au monde. Que je te remercie d'avoir rendu ça possible.
Younouss: Il faut dire, que le Kumpo ne fait pas de distinction de religion. Ce qui l'intéresse, c'est le choix des gens. La reunification des gens. C'est l'interreligion qui prime. Chacun croit a ce qu’il doit croire. Le Kumpo n'est pas là pour distinguer. C'est le lien qu'il veut, quelle que soit la religion.
Rolf: Je suis toujours impressionné. J'espère que cette scène invitera les spectateurs/trices à s'intéresser davantage aux différentes cultures et à en tirer des enseignements positifs. Sais-tu s'il y a eu des événements où les colonialistes français ont influencé la tradition du Kumpo, voire ont interdit le Kumpo?
Younouss: Non, je pense pas. Du temps de colonialisme je pense, que le Kumpo n’etait pas adiré.
Rolf: Pour moi, le Kumpo est la tradition sociale la plus impressionnante et la plus enrichissante que j'ai jamais vue. Merci, Younouss, de m'avoir fait vivre cette expérience et de nous avoir permis de réaliser cette scène de film ensemble.
Younouss: Merci à toi, Rolf. C'est un honneur de savoir que la Culture Sénégalaise, Casamançaise et en particulier la Culture Diola de mon village Tendimane est présentée au monde. Que je te remercie d'avoir rendu ça possible.
Voici une vidéo dans laquelle Younouss prends la parole et communique avec le Kumpo:
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Rolf: La voix que l'on entend chez toi Sylvia, la protagoniste en tant que danseuse dans le hall industriel "J'embrace la pensée de la mort, comme je trouve la poussière belle" est pour moi une expression de cette appréciation de l'éphémère.
Sylvia Ouattara (la protagoniste danseuse): „La prise de conscience de son «caractère éphémère» ne doit pas angoisser l’homme mais le pousser à prendre ses «responsabilités» envers lui-même et son prochain“, a déclaré le pape François.
Rolf: Lors du tournage, nous avions convenu que toi, tu danserais jusqu'à ce que tu atteignes tes propres limites physiques, jusqu'à l'épuisement total, et que nous laisserions ce processus se dérouler et que nous le filmerions aussi consciemment.
Sylvia: Exactement, cette idée était un peu effrayante dans la mesure où ni toi ni moi ni Yvonne la costumière ne savions comme mon corps réagirait lorsqu’il atteindrait ses limites physiques. Toutefois le fait d’y penser éveillait en moi une grande curiosité accompagnée de diverses questions notamment: Qu’est ce que je vais faire quand je serai épuisée? Comment mon corps se comportera t’il? Dois je me laisser emporter par la musique? Devrais je suivre le mouvement de mon corps? Ou pourrais je tout calculer?
Rolf: C'était comment pour toi?
Sylvia: J’étais à la fois confuse et excitée 🤩
Rolf : Lorsque tu t'es retrouvé une nouvelle fois au sol et que tu as respiré fortement, tu étais tout à fait toi-même, sans confusion. Le moment de l'épuisement merveilleux possède souvent une magie.
Sylvia: Je pense aussi que dans l’épuisement total l’esprit de l’homme prends le contrôle total et lui redonner un second souffle.
L’épuisement pour moi est le moment où le corps ne peut plus répondre! Il lâche pour faire place à l’esprit.
Je découvre la force de mon esprit!! Le mental commence a communiquer ouvertement avec le corps. On se redécouvre, on observe des facettes cachées de l’homme qu’on est.
Rolf: C'est vrai. La protagoniste que tu incarnes ressent dans cette scène la certitude de la mort comme quelque chose d'affirmatif. Peut-être que certains spectateurs et spectatrices le perçoivent différemment.
Sylvia: J’étais à la fois confuse et excitée 🤩
Rolf : Lorsque tu t'es retrouvé une nouvelle fois au sol et que tu as respiré fortement, tu étais tout à fait toi-même, sans confusion. Le moment de l'épuisement merveilleux possède souvent une magie.
Sylvia: Je pense aussi que dans l’épuisement total l’esprit de l’homme prends le contrôle total et lui redonner un second souffle.
L’épuisement pour moi est le moment où le corps ne peut plus répondre! Il lâche pour faire place à l’esprit.
Je découvre la force de mon esprit!! Le mental commence a communiquer ouvertement avec le corps. On se redécouvre, on observe des facettes cachées de l’homme qu’on est.
Rolf: C'est vrai. La protagoniste que tu incarnes ressent dans cette scène la certitude de la mort comme quelque chose d'affirmatif. Peut-être que certains spectateurs et spectatrices le perçoivent différemment.
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Sylvia: Peut-être, oui.
Des épuisements physiques j’en ai ressenti de diverses manières chacune avec son lot d’émotions. Je pourrais par exemple citer le jour où …
(Pause)
… Je ne suis pas encore prête émotionnellement a expliquer ces traumatismes.
Rolf: D'accord, je comprends...
(Pause)
Dois-je parler d'une expérience personnelle, qui n'était toutefois pas traumatisante?
Sylvia: Oui, volontiers.
Rolf: Cette scène me rappelle une expérience que j'ai vécue lors de mon voyage à vélo de Zurich à Abidjan (à la fin duquel cette scène du film a été tournée). J'étais seul à vélo dans le Sahara occidental, vers le sud en direction du Sénégal. Tout à coup la route s'est soudainement arrêtée. Devant moi, il n'y avait plus que du sable et la mer. J'ai regardé la carte et j'ai vu qu'après environ 6 kilomètres vers le sud, une route plus large était à nouveau indiquée.
Il était déjà 5 heures du soir et je ne savais pas si j'allais pouvoir traverser le sable mou sans chemin. Dois-je faire demi-tour? Si non, aurais-je assez d'eau sur moi? Est-ce que je risque de me perdre? Et si après six kilomètres, il n'y avait toujours que du sable?
La mer bruissait. Le vent soufflait. Le désert au bord de la mer. J'ai commencé à pousser le vélo dans le sable. J'étais plus lent qu'à pied. Il faisait chaud. J'ai tout enlevé. Pas une seule personne en vue. Après environ un kilomètre, j'étais totalement épuisé. J'avais peur de me perdre dans cet isolement.
Puis soudain, dans cet épuisement total, dans cette peur subtile de la mort, dans ma nudité dans le désert, une euphorie insondable est soudain apparue en moi. Je ne sais pas d'où. Une conscience de ma petite vie dans un univers immensément grand s'est allumée.
Seul, sur la terre, dans l'univers, mon esprit, mon corps, dans le désert, un petit être humain, parmi tant d'autres. Je suis submergé. L'eau et la terre se touchaient. L'air et le corps se sont mélangés. J'ai ressenti une véritable conscience de la magnifique vanité de ma propre vie. Je me suis senti vivant et fondamentalement heureux comme rarement auparavant.
Sylvia: Whaooo c’est une expérience unique tu n’oublieras jamais ce jour!
Je connais ce sentiment d’avoir l’impression que tout est fini mais c’est aussi à ce moment qu’il faut prendre la décision la plus importante dans sa vie, se résigner et s’éteindre ou l’inverse allier force, énergie et se reprendre.
Rolf: Où as-tu déjà eu ce sentiment ?
Sylvia: Je l’ai déjà ressenti dans l’expérience précitée lors de l’accouchement.
Rolf: Je peux l'imaginer.
(Pause)
Est-ce que tu te considères comme croyant?
Sylvia: Oui, je suis croyante.
Rolf: Que signifie pour toi la phrase „Il a dit que j’étais que cendre et poussière, mais il a oublié qu’il s’agissait de poussière d’étoile“?
Sylvia: Comme je suis croyante je citerais ceci génère 3v19: Tu retournes dans la terre, d'où tu as été pris; car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière.
Ce souvenir nous accompagne chaque jour, c’est l’essence même du cycle de la vie. Nous sommes poussières et nous y retournerons mais pas sans avoir atteint le bout pour lequel la poussière que je suis à pris forme.
La poussière d’étoile qui est en effet un bloc nuageux qui interceptent la lumière représente la façon dont l’humain est amener à briller ✨ sur la terre!!
A refléter ou réfléchir la beauté de son créateur!! A impacter, à laisser des traces dans ce monde avant de ”repartir“ à la poussière.
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Rolf: La poussière, que l'on ne qualifie plus d'être humain, est aussi élevée au rang de quelque chose de cosmique.
Quand tu te vois danser dans le film, à quoi penses-tu? Comment tes mouvements d'improvisation se sont-ils assemblés pour devenir ceux du film?
Sylvia: Je pensais à ma vie. Tous ce que j’ai pu traversé. La maltraitance, les coups , etc…. La femme délaissée, oubliée que j’étais devenue et qui n’avait que la danse comme moyen d’expression, moyen pour être vu, moyen pour briller.
Je me suis laisser emporter par mon corps lui même emballé par la musique que nous avons choisi. Tourner dans cette poussière était un défi pour moi comment rendre tous ce que je ressens?!!! Comment traduire mes sentiments? Comment faire un avec cet élément? Pour traduire la beauté de cette pensée la mort vu autrement.
Rolf: Que signifie pour toi ce cri du début?
Sylvia: Ce cri marquait la fin du silence de cette femme abandonnée par la société.
C’était l’heure de tout expliquer en dansant corps à corps avec la poussière. L’idée de développer de la poussière en visuel dans le film s’apparentant à la façon dont le corps s’évanouira après la mort était enrichit et magnifique.
Quand tu te vois danser dans le film, à quoi penses-tu? Comment tes mouvements d'improvisation se sont-ils assemblés pour devenir ceux du film?
Sylvia: Je pensais à ma vie. Tous ce que j’ai pu traversé. La maltraitance, les coups , etc…. La femme délaissée, oubliée que j’étais devenue et qui n’avait que la danse comme moyen d’expression, moyen pour être vu, moyen pour briller.
Je me suis laisser emporter par mon corps lui même emballé par la musique que nous avons choisi. Tourner dans cette poussière était un défi pour moi comment rendre tous ce que je ressens?!!! Comment traduire mes sentiments? Comment faire un avec cet élément? Pour traduire la beauté de cette pensée la mort vu autrement.
Rolf: Que signifie pour toi ce cri du début?
Sylvia: Ce cri marquait la fin du silence de cette femme abandonnée par la société.
C’était l’heure de tout expliquer en dansant corps à corps avec la poussière. L’idée de développer de la poussière en visuel dans le film s’apparentant à la façon dont le corps s’évanouira après la mort était enrichit et magnifique.
Rolf: La poussière, un souvenir qui aide ton personnage à devenir plus vivant. Tu te lèves, tu tournes, tu oscilles, un cercle de vie et de mort.
Sylvia: Je me redécouvre et j'observe des facettes cachées de la personne que je suis. (Pause)
Qu'est-ce qui t'a amené à Abidjan, Rolf?
Rolf: Il y a plusieurs raisons, mais l'une d'entre elles est la suivante: il y a quelques années, j'ai vu une pièce de théâtre à Lausanne, en Suisse, sur le mouvement "Coupé Décalé". L'Ivoirien "Gadoukou La Star", entre autres, y jouait. J'ai été enthousiasmée par lui et par la pièce. Je voulais en savoir plus sur "Coupé Décalé" et vivre la vibe d'Abidjan, où le mouvement "Coupé Décalé" a pris son envol.
Sylvia: Je suis tellement heureuse d’avoir pu faire cette expérience. Ça l’as permis d’avoir une autre appréhension sur la vie en elle même et une approche différente de l’idée de la mort!!! J’ai été vraiment ravie merci à Gadoukou la Star et à toute son équipe! Merci à toi, Rolf d’avoir eu un confiance en moi pour la réalisation de ce projet!!
Dans l’espoir que ce message parcours la terre.
Rolf: Merci à toi, Sylvia, d’avoir eu un confiance en moi également! Ça me aussi permis d’avoir une autre appréhension sur la vie!
Sylvia: Je me redécouvre et j'observe des facettes cachées de la personne que je suis. (Pause)
Qu'est-ce qui t'a amené à Abidjan, Rolf?
Rolf: Il y a plusieurs raisons, mais l'une d'entre elles est la suivante: il y a quelques années, j'ai vu une pièce de théâtre à Lausanne, en Suisse, sur le mouvement "Coupé Décalé". L'Ivoirien "Gadoukou La Star", entre autres, y jouait. J'ai été enthousiasmée par lui et par la pièce. Je voulais en savoir plus sur "Coupé Décalé" et vivre la vibe d'Abidjan, où le mouvement "Coupé Décalé" a pris son envol.
Sylvia: Je suis tellement heureuse d’avoir pu faire cette expérience. Ça l’as permis d’avoir une autre appréhension sur la vie en elle même et une approche différente de l’idée de la mort!!! J’ai été vraiment ravie merci à Gadoukou la Star et à toute son équipe! Merci à toi, Rolf d’avoir eu un confiance en moi pour la réalisation de ce projet!!
Dans l’espoir que ce message parcours la terre.
Rolf: Merci à toi, Sylvia, d’avoir eu un confiance en moi également! Ça me aussi permis d’avoir une autre appréhension sur la vie!
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SCÈNE “SANS-ABRI“
C’est dans un café d'Abidjan que je t'ai rencontré, Jean-Luc. Nous nous sommes tout de suite compris et avons parlé ouvertement de nos vies et de nos soucis.
Jean Luc: La premiere fois au café, j'ai vu une lumière en toi, l'humilité en toi et la vérité en toi. C’était une coincidence, quand tu m’approchait, car j’étais dans cette situation.
Rolf: Tu m'as dit que tu avais été en prison, que tu avais tout perdu : Amis, famille, femme, maison, argent.
Jean Luc: Oui. Le personage que jai imité dans le film, c’est du réel. C’est mon vecu. C’est une époque de ma vie.
J'ai compris que je dois accepter la situation dans laquelle je vis et je peux avoir une pensée de gratitude qui envoie la lumière et extrait la joie. J'exprime cette pensée parce que je respire et que je suis en bonne santé, malgré cette situation.
Rolf: Dans les jours qui ont suivi, nous avons créé cette scène de film fictive, basée sur ton expérience et la chanson de Nina Simone “Aint got no - I got Life”.

Jean Luc: La premiere fois au café, j'ai vu une lumière en toi, l'humilité en toi et la vérité en toi. C’était une coincidence, quand tu m’approchait, car j’étais dans cette situation.
Rolf: Tu m'as dit que tu avais été en prison, que tu avais tout perdu : Amis, famille, femme, maison, argent.
Jean Luc: Oui. Le personage que jai imité dans le film, c’est du réel. C’est mon vecu. C’est une époque de ma vie.
J'ai compris que je dois accepter la situation dans laquelle je vis et je peux avoir une pensée de gratitude qui envoie la lumière et extrait la joie. J'exprime cette pensée parce que je respire et que je suis en bonne santé, malgré cette situation.
Rolf: Dans les jours qui ont suivi, nous avons créé cette scène de film fictive, basée sur ton expérience et la chanson de Nina Simone “Aint got no - I got Life”.
Jean Luc: J'ai décidé de partager ma véritable expérience dans la forme de poème.
J’ai réalisé, qu’il ne faut pas perdre son but de vie, d’essayer d’être heureux avec soi-même, dans n’importe quelle situation, et d’avoir une estime de soi et une confiance de soi.
Rolf: Nous voulions représenter un personnage qui, dans toutes les immenses difficultés de la vie, trouve une attitude incroyablement affirmative face à la vie, grâce à la confiance qu'il a en son corps et en son libre arbitre.
Jean Luc: Je suis ni mort, ni en vie, mais je respire. Est-ce que tu comprend ca?
Rolf: Juste un peu.
Jean Luc: Quand tu respires, quand tu es dans le présent, tu n'es ni mort ni vivant. C'est l'énergie cosmique qui remplit tout ton corps. En plus de la respiration, il y a autre chose. On ne peut être ni mort ni vivant. C’est profond, non?
Rolf: Oui. Un peux abstrait, mais c’est nous:)
Jean Luc: C’est nous.
Rolf: Je me rends compte après coup qu'en tant que Suisse privilégié, je ne suis peut-être pas dans la position adéquate pour réaliser une telle scène. Rétrospectivement, je vois la problématique de vouloir exprimer quelque chose sur le thème de la précarité en Côte d'Ivoire en tant que Suisse blanc, car il y a le risque que je reproduise des stéréotypes. Alors que pour moi, il s'agissait justement de briser les stéréotypes possibles avec le personnage du film et d'attribuer au personnage, face aux circonstances les plus difficiles, l'intellect, la dignité et la sagesse les plus élevés. À ce moment-là, lorsque nous nous sommes rencontrés, il m'a semblé approprié de partager ta situation personnelle d'une manière cinématographique. Dans cette collaboration, nous voulions ouvrir une perspective qui, selon nous, pourrait être formatrice pour des autres.
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Jean Luc: Oui, ce n'est pas une question d'origine ou de couleur de peau. La scène est vraie et universelle, c’est une réalité. Tu m'as donné le courage de me montrer au public, de me libérer, de me décharger de cette partie de moi. Je suis arrivé à m’exprimer vers toi. J’ai trouvé le courage d’exprimer ma situation. Cela m’a donné la force de ne pas avoir honte de présenter ma douleur. De dégager tout ce pardon de moi.
C’était comme une libération pour moi. Cela m'a donné de l'amour pour moi-même et de la confiance en moi. J'ai pris conscience que le meilleur cadeau de la vie est de savoir que rien n’est permanent et de respirer que le changement est possible. Après le tournage de cette scène, la nature m'a donné de nouveaux horizons.
Je repensait mes relations, j’étais allumé, j’étais en conforme au loi. Ce sont ses valeurs que ça m’a donné. Et ces valeurs la, ne sont pas faciles à définir. Mais tu m’a permis de définir ces valuers la, parce que j'en émettais moi-même, mais sans le savoir.
C’était comme une libération pour moi. Cela m'a donné de l'amour pour moi-même et de la confiance en moi. J'ai pris conscience que le meilleur cadeau de la vie est de savoir que rien n’est permanent et de respirer que le changement est possible. Après le tournage de cette scène, la nature m'a donné de nouveaux horizons.
Je repensait mes relations, j’étais allumé, j’étais en conforme au loi. Ce sont ses valeurs que ça m’a donné. Et ces valeurs la, ne sont pas faciles à définir. Mais tu m’a permis de définir ces valuers la, parce que j'en émettais moi-même, mais sans le savoir.
Si on ne le sait pas, c'est parce qu'on n'a pas d'estime de soi, pas de conscience de soi, pas de confiance en soi.
Mais à travers de ce film, j’ai compris, que j’ai une valeur dans cette société, j’ai une place dans cette société.
Je suis une entité qui peux contribuer au bien-etre. Et je peux aussi apporter ma pierre a l’édifice social.
Etre heureux avec le peu que tu as. C’est une valeur! Voilà!
Il n'y a rien qui puisse t'enlever cette valeur.
Cela m’a ouvert les yeux et l’esprit. Moi, je te remercie, parce que tu as remarqué un valeur en moi, tu a déclenché chez moi qu’il faut avoir confiance en soi.
Rolf: Je suis touché de tes mots, Jean-Luc!
Tu as déclenché en moi la nécessité d'avoir plus de gratitude pour mon corps. Je te remercie pour la confiance que tu me témoignes aussi et pour le partage de ta sagesse, Jean-Luc.
Mais à travers de ce film, j’ai compris, que j’ai une valeur dans cette société, j’ai une place dans cette société.
Je suis une entité qui peux contribuer au bien-etre. Et je peux aussi apporter ma pierre a l’édifice social.
Etre heureux avec le peu que tu as. C’est une valeur! Voilà!
Il n'y a rien qui puisse t'enlever cette valeur.
Cela m’a ouvert les yeux et l’esprit. Moi, je te remercie, parce que tu as remarqué un valeur en moi, tu a déclenché chez moi qu’il faut avoir confiance en soi.
Rolf: Je suis touché de tes mots, Jean-Luc!
Tu as déclenché en moi la nécessité d'avoir plus de gratitude pour mon corps. Je te remercie pour la confiance que tu me témoignes aussi et pour le partage de ta sagesse, Jean-Luc.
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SCÈNE
„SANG MENSTRUEL“
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Laetitia: Cette scène signifie pour moi une réappropriation de son propre corps, car le thème des menstruations est un sujet tabou. Les menstruations dans différentes cultures, même les cultures qui se considèrent comme progressistes, considèrent les menstruations comme sales. On ne peut pas en parler, même dans la publicité, dans plein d'endroits, même si la moitié de la population a ses règles, les femmes ont toujours honte de ça. Il faut se cacher, il faut chuchoter. Et cette scène là, c'est une façon de dire que, j'en a marre de tout ça. Il y a rien à cacher. il n'y a pas de quoi avoir honte. Les règles sont une fonction naturelle. Et non seulement c'est une fonction naturelle: sans cette fonction là, tout le monde n'existerait pas. C'est grâce à ça, que le monde existe. C'est absurde de mettre toute cette honte autour de ce phénomène là. Donc, cette scène pour moi est un message aux femmes et au monde pour leur dire il y a pas de quoi avoir honte.
Rolf: Quel est ton parcours pour arriver à cette conscience de soi pour en parler?
Laetitia: C’est un parcours un peu trop long pour que je puisse en parler maintenant.
J'ai écrit à ce sujet, entre autres, dans mon livre „Love and Justice.“
La confiance en soi, ça a été une sorte d'effet domino. Il y a eu une période de ma vie adolescente, où il y a rien chez moi que j'appréciais. Et le parcours a commencé tout seul, avec l'appreciation de mes cheveux, avec l'appreciation de ma peau, de ma nez, et petit à petit, je me suis mise à apprécier tout ce qui fait de moi une femme, une femme noire. Les choses sont venues assez graduellement. Et j'ai eu la chance aussi d'être inspirée par beaucoup de femmes que j'observais sur Internet, puis qui arrivaient à aborder des sujets tabous, même si c'est pas forcément les règles. Tout ce qu'on essaie de rendre tabou, là, quelquefois, c'est pas très logique.

Laetitia: Cette scène signifie pour moi une réappropriation de son propre corps, car le thème des menstruations est un sujet tabou. Les menstruations dans différentes cultures, même les cultures qui se considèrent comme progressistes, considèrent les menstruations comme sales. On ne peut pas en parler, même dans la publicité, dans plein d'endroits, même si la moitié de la population a ses règles, les femmes ont toujours honte de ça. Il faut se cacher, il faut chuchoter. Et cette scène là, c'est une façon de dire que, j'en a marre de tout ça. Il y a rien à cacher. il n'y a pas de quoi avoir honte. Les règles sont une fonction naturelle. Et non seulement c'est une fonction naturelle: sans cette fonction là, tout le monde n'existerait pas. C'est grâce à ça, que le monde existe. C'est absurde de mettre toute cette honte autour de ce phénomène là. Donc, cette scène pour moi est un message aux femmes et au monde pour leur dire il y a pas de quoi avoir honte.
Rolf: Quel est ton parcours pour arriver à cette conscience de soi pour en parler?
Laetitia: C’est un parcours un peu trop long pour que je puisse en parler maintenant.
J'ai écrit à ce sujet, entre autres, dans mon livre „Love and Justice.“
La confiance en soi, ça a été une sorte d'effet domino. Il y a eu une période de ma vie adolescente, où il y a rien chez moi que j'appréciais. Et le parcours a commencé tout seul, avec l'appreciation de mes cheveux, avec l'appreciation de ma peau, de ma nez, et petit à petit, je me suis mise à apprécier tout ce qui fait de moi une femme, une femme noire. Les choses sont venues assez graduellement. Et j'ai eu la chance aussi d'être inspirée par beaucoup de femmes que j'observais sur Internet, puis qui arrivaient à aborder des sujets tabous, même si c'est pas forcément les règles. Tout ce qu'on essaie de rendre tabou, là, quelquefois, c'est pas très logique.
Rolf: De même que les menstruations sont souvent taboues dans la société, la mort l'est aussi souvent. Par exemple, la mort des animaux abattus pour la nourriture est souvent taboue. Mais c'est le sujet d'une autre scène du film. Si tu penses à la mort, est ce qu'il y avait des moments où tu avais peur?
Laetitia: Il y a aucun moment ou je pense clairement à la mort. Ça n'arrive pas. Sauf dans les moments ou quelqu’un/e meurt. C’est une petite claque. Je ne pense pas à la mort d'une façon profonde. Je pense à la mort de façon superficielle. Franchement, pour moi la mort c'est la vie. J’essaie de vivre en tout cas au jour le jour, en essayant quand même de penser un peu à l’avenir. Je n'ai pas vraiment peur de la mort. Peut-être plus de la mort de mes proches que de moi-même.
Rolf: Comment s'est passé le tournage pour toi?
Laetitia: C’était drôle, amusant. J'ai bien aimé le concept d'utiliser son sang pour peindre.
Ça correspondait le niveau de provocation, le niveau d'audace que j'ai à la base, que ce soit dans mon art ou dans mon quotidien. Donc ça n'a pas été difficile à faire. Je me suis sentie très à l'aise et je me suis bien amusée.
Rolf: Moi aussi, mais j'étais aussi un peu nerveux au début parce que tu es célèbre. Pour ceux qui ne le savent pas: Laetitia fait des sculptures avec ses propres cheveux et a un énorme suivi sur Instagram: www.instagram.com/laetitiaky
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SCENE „SACRIFICE DE CHÈVRE"
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Rolf: La scène de la chèvre représente un moment où le protagoniste que tu incarnes, Alphaoumar, sacrifies une chèvre et prend simultanément conscience de son propre caractère éphémère et de sa mort future. Ce que le protagoniste du film ressent alors se lit sur ton visage, Alphaoumar, de différentes manières.
Que signifie pour toi cette scène?
Alphoumar: C’est pas facile de parler sur ca en français, parce que moi, j’ai pas étudier le français. Cette scène a été réalisée lors d'un baptême. Chez nous, les musulmans, la tradition veut que nous organisions une fête deux semaines après la naissance, au cours de laquelle nous égorgeons une chèvre et, au même moment, le père annonce le nom du bébé. L'enfant est ainsi baptisé. Ensuite, nous mangeons et buvons tous ensemble.

Rolf: La scène de la chèvre représente un moment où le protagoniste que tu incarnes, Alphaoumar, sacrifies une chèvre et prend simultanément conscience de son propre caractère éphémère et de sa mort future. Ce que le protagoniste du film ressent alors se lit sur ton visage, Alphaoumar, de différentes manières.
Que signifie pour toi cette scène?
Alphoumar: C’est pas facile de parler sur ca en français, parce que moi, j’ai pas étudier le français. Cette scène a été réalisée lors d'un baptême. Chez nous, les musulmans, la tradition veut que nous organisions une fête deux semaines après la naissance, au cours de laquelle nous égorgeons une chèvre et, au même moment, le père annonce le nom du bébé. L'enfant est ainsi baptisé. Ensuite, nous mangeons et buvons tous ensemble.
Rolf: Merci de m'avoir permis de vivre cela avec vous. Je n'avais encore jamais vécu un baptême musulman. C'était pour moi merveilleux et communautair.
Alphaoumar: Oui, c'était un beau baptême.
Rolf: En tant que personne ayant grandi en Suisse, assister à l'abattage d'un animal n'est pas chose courante. Si tu manges de la viande, je considère qu'il est nécessaire de voir de temps en temps comment la viande finit dans ton assiette, et si tu ne veux pas le voir, tu dois en tirer les conséquences.
Dans la culture suisse, tout est fait pour que personne ne "doive" assister à l'abattage d'un animal. Pour la plupart des gens, il s'agit d'une réalité voilée, cachée, refoulée, à laquelle ils ne veulent pas être confrontés. La mise à mort d'un animal ne fait pas partie de la culture suisse. Je pense de manière générale que la culture européenne a tendance à évoluer vers une situation où la mort n'a plus sa place, où la mort est cachée, où la mort est refoulée autant que possible. La scène représente à mon avis la présence instructive de la mort dans la vie. L'Europe a encore beaucoup à apprendre de la culture guinéenne.
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SCÈNE "EUPHORIE DANS LA NUIT“
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Rolf: J’ai passé toute la journée seule à vélo dans le sud du Sénégal. C'était mon anniversaire et j'avais déjà accepté que je le fêterais probablement seul cette année.
Quand je suis arrivé à Kolda, l'équipe de football sénégalaise a gagné la nuit même la Coupe d'Afrique et je n'étais pas du tout seul. Tout le monde s'est précipité dans la rue, a chanté, fait la fête et dansé. Je n'avais jamais vu une telle euphorie collective de ma vie.
Doudou Touré, tu as célébré le moment avec ton sifflet et tu as fait cette performance dans la rue.
Doudou: Oui, je suis comme ca. Ce jour-là, j'étais très content, c'est pourquoi j'ai agi de la sorte.

Rolf: J’ai passé toute la journée seule à vélo dans le sud du Sénégal. C'était mon anniversaire et j'avais déjà accepté que je le fêterais probablement seul cette année.
Quand je suis arrivé à Kolda, l'équipe de football sénégalaise a gagné la nuit même la Coupe d'Afrique et je n'étais pas du tout seul. Tout le monde s'est précipité dans la rue, a chanté, fait la fête et dansé. Je n'avais jamais vu une telle euphorie collective de ma vie.
Doudou Touré, tu as célébré le moment avec ton sifflet et tu as fait cette performance dans la rue.
Doudou: Oui, je suis comme ca. Ce jour-là, j'étais très content, c'est pourquoi j'ai agi de la sorte.
Rolf: Pour moi, cette nuit a été une expérience flagrante et merveilleuse d'extase collective et de communion.
Doudou: Pour moi aussi, c’était trés spécial, cette fête de la victoire!
Rolf: Qu’est-ce que ça signifie pour toi?
Doudou: Rolf, Je ne peux même pas expliquer, bilahi.
Rolf: Pour moi, cette scène symbolise aussi la civilisation humaine, dans laquelle de nombreux corps se lient spontanément en extase, puis s'unissent dans une sorte de perception dilatée du temps. Cela contraste avec la scène précédente: le monde calme et sans civilisation du Kumpo (la créature de paille) et de la nature.
11
"SCÈNE DANSE DES PÉTALES”
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Rolf: La scène des pétales dansants a été réalisée au Maroc, alors que j'étais à vélo, en direction du Sénégal. Il y avait une tempête naissante dans l'air. Il était difficile de garder l'équilibre sur le vélo. J'ai remarqué que les gens quittaient peu à peu la route. Je me sentais de moins en moins en sécurité pour continuer à rouler. Soudain, j'ai vu une petite tornade sur le trottoir, qui faisait tourbillonner des pétales blancs avec des déchets plastiques. Je me suis arrêté et j'ai assisté à un tout petit phénomène naturel. La tornade se formait toujours au même endroit.
J'ai décidé d'immortaliser ce moment. Au début du voyage, je ne savais pas si un film allait voir le jour, mais après cette scène, j'ai pensé au type de film.
J'ai écrit le poème de la voix chuchotée pendant la phase de montage.
Il se réfère spirituellement à la première scène avec le Kumpo, la créature de paille, qui représente entre autres la croyance des Diolas selon laquelle tout possède une âme. L'enfant s'adresse à sa mère, la Terre Mère. Il s'avère que l'enfant n'est pas un enfant humain, mais un pétale de fleur. Le pétale est animé et parle: "je suis tombé, mais je peux danser, mieux que jamais, avec ton frère le vent et mon nouvel ami, le plastique".
Ces lignes me sont venues alors que je regardais les images encore et encore.

Rolf: La scène des pétales dansants a été réalisée au Maroc, alors que j'étais à vélo, en direction du Sénégal. Il y avait une tempête naissante dans l'air. Il était difficile de garder l'équilibre sur le vélo. J'ai remarqué que les gens quittaient peu à peu la route. Je me sentais de moins en moins en sécurité pour continuer à rouler. Soudain, j'ai vu une petite tornade sur le trottoir, qui faisait tourbillonner des pétales blancs avec des déchets plastiques. Je me suis arrêté et j'ai assisté à un tout petit phénomène naturel. La tornade se formait toujours au même endroit.
J'ai décidé d'immortaliser ce moment. Au début du voyage, je ne savais pas si un film allait voir le jour, mais après cette scène, j'ai pensé au type de film.
J'ai écrit le poème de la voix chuchotée pendant la phase de montage.
Il se réfère spirituellement à la première scène avec le Kumpo, la créature de paille, qui représente entre autres la croyance des Diolas selon laquelle tout possède une âme. L'enfant s'adresse à sa mère, la Terre Mère. Il s'avère que l'enfant n'est pas un enfant humain, mais un pétale de fleur. Le pétale est animé et parle: "je suis tombé, mais je peux danser, mieux que jamais, avec ton frère le vent et mon nouvel ami, le plastique".
Ces lignes me sont venues alors que je regardais les images encore et encore.
J'ai imaginé, comme un enfant, l'histoire d'un pétale qui vit d'abord comme une feuille unique dans une fleur, bien ancrée avec ses autres pétales bien-aimés - et vient un moment où la fleur se désagrège, ils se séparent, les pétales tombent individuellement, c'est-à-dire que la famille ou le partenariat se disloque. Ce n'est qu'au moment de la séparation que le pétale peut véritablement danser, car il n'est plus fixé, même s'il se sent perdu. Et il se fait de nouveaux amis: le vent et le plastique.
Considérer le plastique comme un/e ami/e avec une âme peut avoir quelque chose d'étrange et de "néo-animiste".
Dans la désignation "le plastique, mon ami", on peut aussi voir un commentaire critique sur l'intervention de l'humanité dans la nature. La nature et le pétale semblent n'avoir d'autre choix que d'intégrer les déchets problématiques des hommes dans leur communauté, de les animer eux aussi et éventuellement de „les aimer“. La nature en tant qu'organisme qui ne juge pas, qui accepte et accueille tout, même ce qui est pesant.
Avant le voyage, j'avais vécu une grave séparation et un deuil. Je suis tombée dans un trou si profond et si sombre que je n'en avais jamais connu de ma vie. Pendant cette période sombre, j'ai appris à danser. J'ai réappris à danser. D'où la phrase "je suis tombé, mais je peux danser, mieux que jamais".
Dans le chagrin le plus profond, je dansais tous les jours, la nuit dans les parcs, à midi dans ma chambre, le soir dans les cours, malgré la tristesse, ou à cause de la tristesse. J'avais l'impression que la danse était le dernier cadeau de la personne qui a quitté ma vie. Là encore, le thème de voir le corps comme un cadeau ultime, éphémère et toujours présent résonne pour moi.
12
SCÈNE “MA VIE”

Rolf: Le chapitre 2 "Ma Vie" consiste en une image qui dure 0,1 seconde.
Cet éclair est une allusion à mon expérience du temps par rapport à un contexte plus large. Dans l'horizon temporel de la terre, des pierres, des éléments, ma vie est un instant le plus court, un tout petit éclair dans le néant.
Cette conscience de mon bref passage sur cette terre est pour moi un dernier rappel du caractère éphémère de mon corps.
A la fin de ma vie, juste avant de mourir, je regarderai probablement ma vie en arrière et elle passera devant moi comme un éclair.
Cette image est un mélange de mes betteraves brûlées presque noires au four et d'œuvres d'art de Jackson Pollock.
J'espère que les spectateurs et spectatrices accueilleront ce chapitre avec un clin d’œil.
13
EN GÉNÉRAL
Je tiens à préciser qu'il s'agit là de nos réflexions personnelles. Nous ne voulons pas que notre interprétation des choses écrase les interprétations individuelles des spectateurs/spectatrices, car ces scènes, comme l'ensemble du film, peuvent être lues de manières très différentes, et chaque manière a sa justification.
14
POSTCOLONIALISME, EXOTISME, APPROPRIATION CULTURELLE
Rolf: J'essaie de refléter ma position d'homme blanc suisse qui tourne un film en Afrique de l’Ouest. Je suis conscient que, dans le contexte d'une éventuelle post-colonisation problématique, je dois établir des partenariats responsables avec des personnes et des communautés. Je me rends compte que jusqu'à présent, on a trop centré la blancheur et la pensée occidentale et qu'il est important de décentrer cela à l’avenir. J'essaie de soutenir cette démarche.
Il est temps d'accueillir des idées, des pensées, des histoires et des perspectives qui mettent en avant des personnes ivoiriennes ou sénégalaises, par exemple. Le colonialisme a été et est encore aujourd'hui un grave problème politique et économique.
Dans le domaine économique en particulier, les hiérarchies et les systèmes de pouvoir du Nord Global restent établis en Afrique de l’Ouest.
Je voudrais encourager chaque personne du Nord Global à s'intéresser davantage aux voix d'Afrique de l'Ouest, par exemple dans le domaine du cinéma (fespaco.bf), du journalisme (africanofilter.org/), de la philosophie (toughconvos.com/female-african-philosophers) et de la musique („boomplay“ est une alternative africaine à spotify), et à apprendre d'elles.
J'espère que ce film apportera une petite contribution à une relation respectueuse.
Dans le film, l'autodétermination et le grand intellect de tous les participants ont été mis en valeur. Le contenu est né d'un échange mutuel. Je souhaite que le film aille à l'encontre d'un cloisonnement des cultures et qu'il inspire d'autant plus l'inclusion et le „vivre ensemble“.
Le film ne vise pas le profit. S’il réalise un gain financier malgré toutes les attentes, les bénéfices seront partagés entre les contributeurs.
Je suis sur le chemin de l'apprentissage et je n'ai probablement pas tout fait correctement dans ce film, où je n'ai pas suffisamment réfléchi à ma position. Nous avons tourné le film sans grande équipe, sans véritable budget et de manière discrète, avec la plus petite hiérarchie possible. Avec ce film et ce voyage, je voulais m’éloigner de mon environnement connu, apprendre des autres, clore un deuil personnel antérieur et chercher l'inspiration pour pouvoir me réorienter. J'invite ceux qui ont une attitude critique vis-à-vis du film à entamer un dialogue constructif avec moi afin que nous puissions améliorer les choses
ensemble.
ensemble.
ensemble.
Rolf: J'essaie de refléter ma position d'homme blanc suisse qui tourne un film en Afrique de l’Ouest. Je suis conscient que, dans le contexte d'une éventuelle post-colonisation problématique, je dois établir des partenariats responsables avec des personnes et des communautés. Je me rends compte que jusqu'à présent, on a trop centré la blancheur et la pensée occidentale et qu'il est important de décentrer cela à l’avenir. J'essaie de soutenir cette démarche.
Il est temps d'accueillir des idées, des pensées, des histoires et des perspectives qui mettent en avant des personnes ivoiriennes ou sénégalaises, par exemple. Le colonialisme a été et est encore aujourd'hui un grave problème politique et économique.
Dans le domaine économique en particulier, les hiérarchies et les systèmes de pouvoir du Nord Global restent établis en Afrique de l’Ouest.
Je voudrais encourager chaque personne du Nord Global à s'intéresser davantage aux voix d'Afrique de l'Ouest, par exemple dans le domaine du cinéma (fespaco.bf), du journalisme (africanofilter.org/), de la philosophie (toughconvos.com/female-african-philosophers) et de la musique („boomplay“ est une alternative africaine à spotify), et à apprendre d'elles.
J'espère que ce film apportera une petite contribution à une relation respectueuse.
Dans le film, l'autodétermination et le grand intellect de tous les participants ont été mis en valeur. Le contenu est né d'un échange mutuel. Je souhaite que le film aille à l'encontre d'un cloisonnement des cultures et qu'il inspire d'autant plus l'inclusion et le „vivre ensemble“.
Le film ne vise pas le profit. S’il réalise un gain financier malgré toutes les attentes, les bénéfices seront partagés entre les contributeurs.
Je suis sur le chemin de l'apprentissage et je n'ai probablement pas tout fait correctement dans ce film, où je n'ai pas suffisamment réfléchi à ma position. Nous avons tourné le film sans grande équipe, sans véritable budget et de manière discrète, avec la plus petite hiérarchie possible. Avec ce film et ce voyage, je voulais m’éloigner de mon environnement connu, apprendre des autres, clore un deuil personnel antérieur et chercher l'inspiration pour pouvoir me réorienter. J'invite ceux qui ont une attitude critique vis-à-vis du film à entamer un dialogue constructif avec moi afin que nous puissions améliorer les choses
ensemble.
ensemble.
ensemble.